Risk Legacy Le Jeu qu'il déchire...les cartes.

Risk Legacy, ou le retour de nos jeunes années.

Un peu d’histoire

Tout le monde connaît le Risk, mais un petit rappel historique ne fait jamais de mal. Le jeu est créé par Albert Lamorisse en 1957 : il s’agit donc d’un jeu français monsieur, ce qu’on a tendance à oublier. Au départ, le jeu s’appelle La conquête du monde et le but du jeu est essentiellement de conquérir le monde (« alors ils ont choisi un nom valable »*). Ce n’est qu’ensuite que les règles sont remaniées par Jean-René Vernes, proposant des missions et des conditions de victoire moins exclusives que la maîtrise de l’intégralité du plateau. Le jeu, à présent nommé Risk, connaît le succès que l’on sait, et se décline selon de nombreuses époques (napoléonienne -mon préféré-, contemporaine, futuriste) et licences (Star Wars, Le Seigneur des Anneaux, mais aussi Narnia, Transformers, Halo et même Metal Gear Solid).

Comment ça marche

Selon les éditions, quelques variantes existent dans les règles, mais de manière générale le jeu est toujours le même : le plateau de jeu représente la carte du monde, vous contrôlez certains territoires au début du jeu dans lesquels vous placez vos petits bonshommes, puis à chaque tour, vous recrutez des renforts, attaquez vos voisins à coups de dés en passant par le Kamchatka et prenez le contrôle de leurs territoires. Rinse and repeat, jusqu’à accomplissement des conditions de victoire définies par votre carte de mission (prendre le contrôle de deux ou trois continents, éliminer un adversaire, etc.).

Le plateau de jeu. Rien de bien nouveau, sauf les multiples autocollants (voir plus loin).

Quoi de neuf

Alors, qu’y a-t-il de nouveau avec Risk Legacy ? Pourquoi ressortir un Risk en 2011, alors que le marché du jeu a sensiblement évolué et que les mécaniques d’antan ne tournent plus aussi bien qu’avant en comparaison avec le jeu dit « moderne » ?

La grande nouveauté, c’est en fait la personnalisation du jeu. Risk Legacy est évolutif : chaque partie sera différente de la précédente car vous allez personnaliser le plateau en fonction des combats que vous allez y livrer. Et la boîte du jeu contient de nombreuses petites boîtes scellées qui réservent bien des surprises.

Quand je dis personnaliser, ce n’est pas une parole en l’air : vous allez déchirer des cartes, mettre des autocollants sur le plateau, écrire dessus, sinistrer certaines régions, en fortifier d’autres, etc. C’est à la fois ce qui fait le charme du jeu, et ce qui fait fuir de nombreux joueurs.

Alors oui, c’est surprenant au départ. Lorsque vous choisissez une faction par exemple, vous devez lui coller un pouvoir spécial parmi deux. Et vous devez déchirer l’autre pouvoir, qui ne sera jamais utilisé. De toute façon, il n’y a qu’un seul emplacement de pouvoir de base sur votre carte de faction : garder religieusement le deuxième ne vous sert à rien. Par contre vous pourrez ajouter d’autres pouvoirs plus puissants ultérieurement, ce qui fait que chaque faction se construit un style de jeu particulier. On ne joue donc pas avec une bête couleur, mais avec une véritable armée qui a ses forces et ses faiblesses. Et naturellement vous n’êtes pas obligés de prendre TOUJOURS la même armée à chaque partie, même si en général on se choisit un chouchou qu’on développe pour un style de combat et qu’on reprend à chaque fois. Cela donne un petit côté JdR et c’est sympa, on s’attache à ses soldats, surtout quand on a passé plusieurs parties à les faire bosser pour qu’ils soient plus efficaces à la partie d’après.

Khan Industries et son pouvoir de départ. Les emplacements libres sont destinés à accueillir d’autres pouvoirs, débloqués au bout de plusieurs parties.

Les factions

Les différentes factions ont toutes des figurines différentes : pour la première partie, j’avais choisi la faction Imperial Balkania, qui dispose de figurines de soldats au garde-à-vous (ci-dessous en violet) et de tanks profilés au design futuriste. il y a aussi Enclave of the Bear (vert) et sa cavalerie à dos d’ours, Saharian Republic (beige) et ses femmes du désert combattantes, Khan Industries (gris) et ses mechas de combat, etDie Mechaniker (rouge) et son armée de robots. Une fois que vous avez choisi votre faction, vous vous déployez sur UNE région du plateau et y mettez votre base. Le but du jeu sera d’ailleurs de capturer deux bases ennemies en conservant la sienne (du moins pour cette première partie).

Les fantassins de chaque faction

There is no going back

Ensuite, c’est une partie de Risk normale… ou presque. Comme on l’a vu, certaines cartes permettent de poser des autocollants sur le plateau. On ne le maîtrise pas forcément à la première partie, mais sauf exception, ces autocollants resteront à vie sur le jeu ! Ainsi, si vous construisez un bunker dans une région, ou si vous provoquez une pénurie de munitions dans l’autre, gardez à l’esprit que le bunker et la pénurie seront toujours là à la prochaine partie. C’est une véritable stratégie à long terme. Avec mes collègues, le Kamchatka et l’Alaska sont tous deux en pénurie de munitions depuis la première partie. Cela les rend très difficiles à défendre (la pénurie de munitions fait subir une pénalité d’un point sur un dé au défenseur), et tenir l’Asie ou l’Amérique du Nord est une entreprise délicate.

Le Moyen-Orient dispose d’une ville fondée par un joueur (bonus de population) et d’une pénurie de munitions (-1 sur un dé du défenseur lorsque la région est attaquée).

Les États-Unis sont sinistrés par un marqueur radioactif. Toute armée y terminant son tour perd une figurine.

J’ai entendu dire que vous aimiez les boîtes

Alors j’ai mis une boîte dans votre boîte de Risk. Au fil des parties, le plateau se dessine, certaines régions se renforcent, d’autres s’affaiblissent. On a l’occasion de fonder des villes, d’inscrire son nom sur le plateau quand on remporte la partie, bref c’est VOTRE jeu que vous créez.

Mais ce n’est pas tout. Je vous ai parlé de personnalisation plus haut ; il ne s’agit pas que d’autocollants à poser sur le plateau. Au fur et à mesure des parties, on s’aperçoit que ça va beaucoup plus loin que ça. Car, à intervalles réguliers, et si des conditions spécifiques sont remplies (éliminer un joueur du plateau, gagner une partie deux fois de suite, etc), la règle nous permet d’ouvrir les petites boîtes scellées qui se trouvent dans la boîte de base. Et du nouveau contenu apparaît. Je ne vais pas tout spoiler pour ceux qui seraient intéressés, mais c’est ainsi que, progressivement, on a accès à des missiles balistiques, des cartes supplémentaires, des villes à construire et à protéger, des fortifications, des zones sinistrées, de nouvelles règles de jeu, de nouveaux pouvoirs pour les factions, des événements spéciaux, et bien d’autres choses encore.

C’est à mon avis la plus grande force de ce Risk : proposer non seulement une évolution du plateau, mais échelonner cette évolution au fur et à mesure des parties, de telle sorte qu’on ne cesse de découvrir le jeu et de s’adapter aux nouvelles stratégies possibles. Au début, pour la première partie, c’est juste un Risk. Mais ensuite, il y a tellement de possibilités de jeu que c’en devient beaucoup plus intéressant.

Je vous dis ça alors que nous sommes encore loin d’avoir ouvert toutes les petites boîtes. Une d’entre elle porte même l’inscription « N’ouvrez jamais cette boîte. Jamais« . Qui sait ce qu’elle contient ? Edit woputain O_o ben maintenant je sais.

Box-ception

 

Risk et péril

Une question qui revient souvent concerne la durée de vie du jeu. En fait, il est plutôt question de la durée d’évolution. Concrètement, le jeu permet de faire quinze parties et de faire évoluer le plateau pendant ce temps. Ensuite, c’est fini. Vous pourrez toujours jouer, mais le jeu sera figé dans l’état où vous l’aurez laissé à la quinzième partie. Et je pense très honnêtement qu’il perd beaucoup d’intérêt de la sorte, à moins d’être un fanatique du Risk.

Toutefois, même si l’annonce d’une durée limitée fait peur, il faut se placer dans un contexte réaliste : jouer quinze parties d’un même jeu, de nos jours, ça représente un sacré bout de temps. Sherlock Holmes Detective Conseil propose dix parties de base : je l’ai acheté il y a plus d’un an et il n’est toujours pas terminé. D’autres jeux de ma ludothèque sortent tellement rarement que j’ai dû en disputer trois ou quatre parties depuis leur achat (Imperial est de ceux-là, faute de joueurs).

Les risk du métier

J’étais moi-même très sceptique avant de jouer ma première partie de Risk Legacy. Abîmer mon matériel de jeu sans possibilité de revenir en arrière, très peu pour moi. Mais finalement cela fait partie du jeu et le rend vivant. C’est vraiment donner une deuxième jeunesse au Risk qui en avait bien besoin. La plupart des jeux aujourd’hui se renouvellent d’eux mêmes grâce à des mécanismes qui font en sorte que chaque partie soit différente ; or le Risk classique obéit à des règles immuables qui rendent les parties quelque peu insipides. Ce nouveau Risk change la donne et même si les premières parties sont un peu laborieuses, on se prend vite à vouloir découvrir ce qu’il y a dans les boîtes.

Ne nous leurrons pas, toutefois : si vous n’aimez pas le Risk de base, les premières parties de celui-ci seront difficiles. Le hasard des dés est toujours très présent, et il ne faut pas le voir comme un jeu de stratégie approfondi. Ce n’est que lorsque de nouvelles règles apparaissent qu’on commence à bien se prendre au jeu.

En fait, Risk Legacy se joue essentiellement en campagne, à la manière d’un Descent ou d’un JdR. Il est préférable, bien que non indispensable, de jouer toujours avec les mêmes joueurs, de manière à ce qu’ils voient le plateau évoluer. Il est difficile d’arriver sur un plateau qui a évolué sans vous, même si ce n’est pas insurmontable. Et j’imagine qu’au bout de quinze parties, le plateau est un témoignage des exploits guerriers de chacun des joueurs !

Au final, une belle découverte … Risk Legacy reste un jeu assez cher (entre 75 et 80€) mais si vous l’achetez avec votre groupe d’amis, ça reviendra à 15-20€ par personne. Et vous retrouverez avec plaisir les alliances de circonstance qui ont fait les belles heures des parties de Risk de votre jeunesse.

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